Interview de Ben

Faire rire, c’est séduire. La prestation de Ben au théâtre Le Temple, qui annonce la naissance d’une valeur sûre, nous a fait tomber dans ses filets. L’humour tout en finesse et en tendresse de ce nouveau chroniqueur de France Inter fait heureusement l’impasse sur les facilités du genre et nous embarque dans un univers attachant où le quotidien est parsemé d’absurde et enrobé d’une irrésistible poésie. C’est dire que nous étions impatients de rencontrer un jeune artiste sachant si bien nous faire rire tout en nous proposant une escapade dans son univers un peu fou.

Comment tout a commencé pour vous ?

Artistiquement parlant, je suis né au Trévise, sur la scène du « Field », le dimanche soir. C’est tout bête, j’habitais dans la rue, je suis allé voir comment ça fonctionnait. J’ai vu que je pouvais m’inscrire pour passer sur scène. Je pensais que c’était une chose totalement inaccessible pour moi et puis voilà que tout d’un coup, c’est devenu possible. J’y serais venu, c’est certain, mais sans ce hasard, il m’aurait fallu un peu plus de temps.


Et avant le Trévise ?

Mon parcours a été un peu chaotique, j’ai eu une histoire familiale compliquée, je me suis emmerdé à l’école, je ne savais pas quoi faire ensuite. J’étais à Nevers, j’ai arrêté les cours en terminale avant de venir à Paris chez un copain où j’ai enchaîné les petits jobs avec l’intention de changer de vie.

Comment en vient-on à écrire un spectacle ?

Cela se fait avec le temps. Pour ma première prestation sur scène, j’ai eu la chance du débutant, je n’ai pas dû faire un truc génial mais tout s’est bien passé et je suis ressorti avec une impression très agréable et surtout l’envie d’écrire pour rejouer devant un public. C’était en 2001. La première version de mon spectacle s’est faite en 2003 et je suis passé par de multiples phases de réécriture. Mais j’ai appris en écrivant. Pour résumer, ma démarche a été de me dire qu’inconnu, la seule solution consistait à écrire mon spectacle et à me mettre en scène. Ensuite, j’ai voulu faire parler de moi en proposant des chroniques à la radio ou en décrochant des rôles dans les séries.

Quels sont les comiques qui ont su vous toucher ?

J’ai été élevé par ma grand-mère, j’ai donc des références assez anciennes et classiques comme Fernandel et Bourvil. J’ai beaucoup aimé certains sketchs de Pierre Palmade, j’ai découvert François Rollin qui m’a vraiment marqué, Pierre Desproges (mais c’est la référence absolue), Jean-Jacques Vannier avec  » L’Envol du pingouin « . Ce qui me touche c’est quand on parvient à aller au-delà de l’humour et à provoquer autre chose que le rire.


C’est un peu le propre de votre spectacle dans lequel on trouve beaucoup de tendresse et de poésie !

Je suis heureux que vous ayez ce sentiment. Aujourd’hui, la tendance est au cynisme, j’ai envie du contraire et d’un humour très tendre. Reste qu’il n’est pas facile de faire rire sans être mordant ou méchant.

Votre spectacle démontre que vous avez de l’imagination. Écrire une pièce est quelque chose qui vous tente ?

Énormément ! Je me suis concentré sur mon one-man show, je ne voulais dépendre de personne et être seul. Là, j’ai peu de temps mais dès que j’en aurai l’occasion je me lancerai dans cette écriture. Je ne sais pas quel sera le résultat mais je le ferai. Je ne suis pas quelqu’un de rapide, il m’a fallu beaucoup de temps pour que le show soit présentable ; donc la pièce, ça peut aussi demander du temps !

Certains humoristes sont réputés pour être dépressifs. Est-ce votre cas ?

Ça peut aussi m’arriver ! C’est bizarre de faire de l’humour son métier. On est obligé d’être drôle, c’est parfois un peu dur. Le rire est spontané, ce n’est pas quelque chose de fabriqué. Prévoir que l’on va aller au spectacle pour rire ou écrire un show comique montre qu’il y a peut-être une angoisse quelque part. Et puis, cela devient une compétition, il y a beaucoup d’humoristes, avec un gros business autour. On ne fait plus rien à la télé ou à la radio sans eux ! L’émission « Le fou du roi » pour France Inter en réunit quatre. C’est un peu comme si l’on voulait endormir les gens en leur disant que la vie est dure mais que dans cinq minutes, on va bien rigoler ! L’information aussi est angoissante, on reçoit des infos (souvent catastrophiques) de tous les côtés, ça n’arrête jamais. Tout cela est un peu oppressant !

Qu’aimeriez-vous que les médias disent de vous ?

En général, ce qu’ils écrivent sur moi est plutôt positif, même si je ne lis pas ce que j’aimerais lire : j’ai parfois le sentiment que ça ne fait que survoler, que l’on parle de ce que je fais en reprenant juste quelques phrases du spectacle. Je me demande toujours si l’on veut dire du bien ou, au contraire, si la personne n’a rien trouvé d’original à dire. J’aimerais être convaincu que le journaliste a vraiment aimé ce que je fais !

Par Philippe Escalier

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  1. Tipo ::

    Comme beaucoup je l’ai découvert à la radio, j’aime son humour tout en finesse.
    Bon article 😉

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